Poiscaille
Le 11 septembre dernier, j’ai reçu un mail de Poiscaille annonçant les difficultés financières de Poiscaille, service que j’utilise depuis un peu plus d’un an (première commande le 29 août 2023).
Poiscaille livre du poisson frais, pêché artisanalement en France dans les 72h avant la livraison, sur le mode de l’abonnement (mais également de la commande ponctuelle). La veille de sa livraison, le client choisit le contenu de son panier parmi une offre assez large de ce qui a été effectivement acheté à des pêcheurs. Si Poiscaille se compare au fonctionnement d’une Amap, l’abonnement est sans engagement.
Les difficultés de Poiscaille ne sont pas si suprenantes. Le site avait déjà ajouté un système de bonus-malus sur le choix du produit : les produits “nobles” (et certainement les plus onéreux) comme le bar entier sont grévés d’un surcoût qui peut être significatif ; les produits “ordinaires” voire impopulaires comme le maquereau sont plus économiques avec un montant plus faible. Une manière de proposer les produits recherchés par une clientèle séduite par son modèle mais n’étant pas intéressée par des produits moins attractifs comme le silure (même si cette démographie est explicitement éloignée dans leurs FAQ).
Dans son mail, Poiscaille expose deux leviers pour l’aider : augmenter la fréquence de son abonnement (augmenter le panier moyen) et parraîner des proches (augmenter le nombre de clients). Poiscaille ne cherche pas à faire du crowdfunding, contrairement à ce que Kelbongoo souhaitait faire avant de se faire racheter.
La vidéo partagée sur leur chaîne YouTube explique de nombreux points. Les commentaires rassemblent des fidèles du service ainsi que des naciens qui ont arrêté leur abonnement, regrettant notamment l’augmentation des prix du panier par rapport à son contenu.
Mon retour d’expérience
Nous sommes abonnés depuis août 2023, et avons découvert grâce aux parents de Clo, qui étaient déjà abonnés et fidèles clients. Nous ne mangeions jamais de poisson, à part lorsque nous étions chez eux. Plusieurs facteurs. Premièrement, aucune de nos lieux d’achat de courses ne propose de poisson sauvage, français et artisanal. Deuxièmement, nous avons des emplois du temps très irréguliers et n’allons pas chez le poissonier (ce que certains utilisateurs en commentaires de la vidéo Poiscaille proposent comme alternative), qui d’ailleurs incluent à la fois des produits d’élevage et étrangers.
Utiliser Poiscaille était une manière de garantir des poissons et crustacés correspondant à nos attentes et nous obliger à en consommer. C’est toujours le cas aujourd’hui, et nous avons rarement été déçus.
Côté rapport qualité-prix, nous dépensons 50 euros par mois chez Poiscaille. D’une part, cela reste une petite partie de notre budget alimentaire mensuel. D’autre part, le coût d’un bien n’existe pas, regardons les alternatives qui s’offrent à nous. Que proposent les poissonneries ? En cherchant quelques minutes, on voit qu’une daurade royale sauvage française et a priori artisanale est vendue à 50 euros pièce et le maquereau vidé à 20 euros le kilo. On n’est pas loin – voire au-dessus – des prix Poiscaille. C’est sans compter la practicité, les garanties de qualité de Poiscaille et les garanties de revenus pour les pêcheurs.
Poiscaille propose en ce moment une promotion et une offre de parainnage. Je recommande pleinement, allez-y !
Chiffres clés (et des ratios un peu arbitraires pour réfléchir à voix haute)
Poiscaille donne quelques chiffres clés. Qu’est-ce que cela nous apprend ?
En septembre 2024, Poiscaille dit avoir:
- 20 500 abonnés (cible : 25 000 abonnés)
- livrer 25 000 paniers par mois au total
- pour 10 000 000 euros de chiffre d’affaires annuel
- et 1 000 tonnes de marchandise par an.
Quelques réflexions :
- nous achetons deux paniers par mois, donc sommes au dessus de la moyenne (1,22 paniers par abonné et par mois)
- le CA moyen par panier est de 33 euros, donc nous sommes en dessous de la moyenne en taille de casier (25 euros par mois) (je mélange probablement du HT et du TTC mais peu importe)
- Poiscaille génère 10 euros de chiffre d’affaire par kilo de marchandise. Cela paraît très peu pour des fruits de mer, surtout par rapport à la valeur moyen du casier. Mais certainement que les 1 000 tonnes sont brutes, avant vidage, découpe et conditionnement.
Poiscaille explique avoir 70 salariés dont 25 au siège. Cela fait 45 salariés pour: acheter en région, transformer (l’étendu du conditionnement fait par Poiscaille n’est pas présenté) et expédier (livrer à Paris et confier au transporteur autrement). Pour 25 000 paniers par mois que je suppose également répartis sur les 20 jours ouvrés d’un mois, cela fait 1 000 paniers à conditionner par jour. Pour (admettons) 30 salariés, cela fait 300 paniers par personne et par jour soit 42 paniers par heure : cohérent.
Poiscaille a publié ses derniers comptes en 2022 mais nous n’avons accès qu’au bilan et pas au compte de résultat. Les “calculs” ici se basent donc sur le site de Poiscaille et sur la vidéo de son fondateur. Le bilan montre quand même que l’entreprise possède des installations industrielles (ce qui est logique considérant son activité de conditionnement) et présente ses dettes, contractées pendant l’exercice de 2021 notamment (dernières données disponibles).
Interrogations
Si quelqu’un de Poiscaille lit ceci, l’objectif était de consigner ce à quoi j’ai pensé en regardant votre vidéo. Je suis preneur de vos précisions sur deux points que je ne comprends pas (par ignorance de ma part):
- le ratio CA et quantité de marchandise,
- la nature des garanties offertes aux fournisseurs et le fonctionnement de votre marché (garanties de prix planchers alors que les prix s’envolent ?).